Le budget du ministère des Armées va de nouveau croître en 2021, à 39,2 milliards d'euros (+4,5%), conformément à la loi de programmation militaire 2019-2025.
Sur les 1,7 Md€ supplémentaires, les deux tiers seront consacrés aux programmes d’armement majeurs. C’est satisfaisant pour nos industries d’armement notamment Naval Group et Nexter.
La situation du pôle munitionnaire de Nexter reste néanmoins préoccupante, l’apport des commandes pluriannuelles du client France doit sécuriser les compétences stratégiques, l’outil industriel mais aussi l’emploi dans le Groupe.
NavalGroup attend encore des annonces formelles pour des programmes structurants SNLE NG et PA NG.
Le contrat SLAM.F (système de lutte anti-sous-marine du futur) devrait aussi assurer de la charge à certains sites en attente notamment Lorient et Ruelle.
Enfin nous espérons que l’effort vers les PME et EPI engagé par le MINARM est clairement conditionné par des réalisations sur le territoire et qu’à l’échelle européenne les partenariats souhaités par la France soient de vraies alliances « gagnant/gagnant ».
Concernant les recrutements, la ministre des Armées annonçait le 16 septembre que, sur le total de 26700 recrutements, 3200 seraient des postes civils. Très bien, mais si dans le même temps des ordres sont donnés aux directeurs d’organismes pour que les postes à faire disparaitre dans la manœuvre très « technique » de sincérisation, soient des postes civils, la CFDT s’interroge sur le total en pied de page.
Le sous-chef performance de l’État-Major des Armées nous disait la semaine dernière qu’il ne fallait pas voir de volonté de déflation dans cette manœuvre. Le DRHMD nous a expliqué que pour faire de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences il fallait des REO sincères. Soit ! la manœuvre est complexe et la CFDT veillera à ce qu’aucun personnel civil ne soit pénalisé.
Le SSA devrait bénéficier des mesures du SEGUR de la santé dans un périmètre limité au HIA et à l’INI. La CFDT demande une transposition des mesures à tous les agents du SSA concernés sans distinction de structures. Quelle différence y-a-t-il entre le travail d’un Technicien Paramédical Civil d’un Hôpital d’Instruction des Armées et celui de la Pharmacie Centrale des Armées ?
La Ministre des armées a évoqué le recentrage du Service de Santé des Armées (SSA) sur le soutien aux forces avec des moyens stabilisés et un arrêt des coupes budgétaires.
Si l’Hôpital d’Instruction des Armées de Brest sort renforcé pour un projet médical rénové soutenant la Force océanique stratégique (FOST), quid des autres Établissements Hospitaliers Civilo-Militaire (EHCM) peu dotés financièrement et quelle sera la politique d’emploi menée dans ces établissements ?
Ce recentrage sur le soutien aux forces, ne doit pas laisser de côté les personnels civils qui contribuent à la réussite de la mission du SSA. Pour ne citer qu’un exemple, certains centres médicaux des armées refusent d’accueillir les personnels civils sans justification de surcharge des dits centres. Cette discrimination doit cesser.
La loi de transformation de la fonction publique veut passer d’une fonction publique d’emplois statutaires à une fonction publique d’emplois contractualisés, « agiles et flexibles », pour ne pas dire « malléables et précaires » !
Même si la ministre nous parle d’un « équilibre à trouver » dans une démarche « pragmatique », permettrez-nous de faire de la résistance :
Recruter des fonctionnaires et des ouvriers de l’Etat a encore tout son sens dans le périmètre régalien du ministère des armées.
Face au nomadisme professionnel des ingénieurs contractuels et à la mobilité des militaires, les personnels sous statuts représentent la stabilité, la réactivité, voire l’efficience, des prestations de soutien aux forces.
Il convient donc de continuer à recruter sous statut et à le faire intelligemment !
Recruter un fonctionnaire ou un ouvrier de l’Etat s’anticipe. Ignorer les principes de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences est incompréhensible.
Pour bien faire le ministère dispose des écoles d’ingénieurs sous tutelle, des examens professionnels, des concours internes et externes et des essais professionnels.
La LPM doit porter le projet de GPEC des personnels civils, c’est un gage d’attractivité et de fidélisation bien sûr mais aussi d’efficacité et de réactivité pour le service rendu aux forces. Il faut faire en sorte que d’intégrer le MINARM ne soit pas, pour les personnels civils, un saut dans l’inconnu.
A part sur des spécialités très pointues, l’évolution récente du corps des Ingénieurs Civils de la Défense doit permettre d’assurer certaines missions jusqu’alors dévolues aux ingénieurs contractuels.
Laissons à ce statut le temps de prendre son régime de croisière et d’aller vers une formation en école d’ingénieur, que le ministère peut assurer en interne, y compris dans les spécialités innovantes et qui finalise sa transformation vers un véritable statut des Ingénieurs des travaux de l’Etat.
De plus la CFDT constate et condamne l’abus du recours à la réserve opérationnelle dans des missions de soutien, très loin de la « force de frappe » évoquée par la ministre, et souvent très couteux (militaires d’active au grade supérieur de leur catégorie) en regard du service rendu, en lieu et place d’agents titulaires au statut et au niveau adapté au besoin réel.
Dans les domaines où ils sont nécessaires, nous notons la forte augmentation des embauches d’ICT en 2020 notamment dans les domaines sécuritaires et cyberdéfense. Même si les salaires d’embauche restent en corrélation avec ceux du « marché », la DGA ne parvient pas à fidéliser : en cause l’insuffisance de l’enveloppe pluri annuelle pour une progression de carrière en rapport avec l’investissement de ces personnels.
Toujours sur les leviers d’attractivité et au-delà de la publicité trop rare sur les métiers occupés par des civils dans les Armées, nous tenons encore une fois à dénoncer le manque d’accompagnement social des nouvelles recrues civiles. En effet, dans de nombreux bassins d’emploi, Ile-de-France, PACA ou encore Bordeaux, les nouvelles recrues avec de bas revenus, éprouvent toutes les difficultés à se loger dignement sinon à être très éloignées de leur lieu de travail entrainant des trajets longs et fatigants. Peut-être une cause d’impossibilité à gréer des postes suite à refus du bénéfice du concours ?
A ce sujet, nous avons approuvé l’aide de 190€ que le MINARM s’apprête à verser pour aider les jeunes recrues civiles et militaires à payer leur complémentaire santé.
Cet apport n’est qu’un pansement en attendant l’ouverture d’une négociation pour la prise en charge d’une partie de la protection sociale complémentaire. La loi de transformation de la fonction publique validait le principe de « redéfinition de la participation des employeurs » à ce financement. Le gouvernement s’était engagé à réformer le dispositif d’ici la fin de l’année 2020, à priori le chantier va s’ouvrir... enfin !
La CFDT attend au plus vite des décisions fermes pour une participation de l’employeur public, à hauteur d’un montant représentant au moins 50% de la cotisation des agents.
Santé toujours, compte tenu de la situation sanitaire, la CFDT appelle de ses vœux la suspension immédiate des jours de carence dans le public comme dans le privé. L’accroissement de la précarité amène de nombreux travailleurs à se rendre à leur travail, même malades ou contagieux.
Dès lors, cette suspension immédiate devient une mesure de justice et de bon sens. La CFDT rappelle qu’elle a toujours considéré que cette mesure ne permettait pas de traiter des absences au travail ou de leurs causes, ni de construire des solutions durables pour l’amélioration de la qualité de vie au travail.
La ministre des armées a évoqué la nécessité d’accompagner l’évolution des moyens par un changement des modes de fonctionnement. Elle a cité la simplification des procédures, pour la mise en œuvre du télétravail par exemple, tout en associant cette idée à la notion de Qualité de Vie au Travail.
Nous nous réjouissons d’une telle approche. Mais elle ne se fera pas sans effort !
Pour la CFDT, bien au-delà de la QVT, le télétravail est aussi facteur d’émancipation et participe à la démarche de transition écologique.
Mais il faut que sa mise en œuvre soit compatible avec nos façons de travailler.
Il s’agit d’un véritable changement de paradigme qui va nécessiter des investissements considérables, surtout en formations.
Le rôle des manageurs va être déterminant pour négocier des objectifs compatibles avec la distance, pour assurer la cohésion au sein de leurs équipes. Il va falloir une bonne fois pour toute, dans les domaines non opérationnels, passer du commandement au management !
Transition toute trouvée pour parler ré-équilibrage des postes entre les personnels civils et les militaires.
Où en sommes-nous ?
Pour les personnels civils les impasses sont encore trop flagrantes sur les chemins des postes à responsabilité.
Ce point est facteur d’efficience et d’une meilleure utilisation de l’argent public. La carrière des militaires impose des périodes de récupération, nous le reconnaissons, mais ils ne doivent pas pour autant squatter la grande majorité des postes de « chef », ça finit par être totalement contre-productif.
Sans lien direct nous attirons votre attention sur la réforme engagée dans le cadre du Maintien en Condition Opérationnel des équipements. Le principe adopté est celui de la verticalisation des contrats. Cette approche responsabilise les acteurs, certes, mais attention à ce qu’elle ne soit pas synonyme d’externalisation à tout crin !
Nous insistons une fois de plus sur la nécessité de garantir la réactivité que seuls les industriels étatiques peuvent assurer et sur l’autre nécessité de laisser à l’Etat la capacité de challenger les industriels privés.
Pour conclure, la CFDT Défense constate que le montant des mesures catégorielles 2021 n’est pas à la hauteur de l’investissement des personnels civils qui ont prouvé leur sens du devoir lors de la crise sanitaire et ce dès les premiers jours du confinement. Grâce à leur soutien technique et administratif de qualité et réactif, le ministère des armées a pu répondre présent et remplir la majorité de ses missions au profit des citoyens et de la Nation.
Paris le 14 octobre 2020